Le phénomène majeur qui limite l'utilisation des techniques de séparation par membrane est le colmatage. On définit généralement le colmatage comme étant l'ensemble des phénomènes qui interviennent dans la modification des propriétés filtrantes d'une membrane. Ces phénomènes qui sont essentiellement de nature physique, chimique, biologique, se produisent à l'interface membrane-solution ou dans le volume poreux, ce qui a pour conséquence principale un blocage des pores, entraînant à la fois une baisse de la perméabilité et une variation de la sélectivité.
Selon SONG (1998) et bien d'autres auteurs, la baisse du flux de perméat au cours du temps qui est la conséquence directe du phénomène de colmatage a lieu en trois phases. La première phase est caractérisée par une diminution importante et rapide du flux, la seconde phase est celle au cours de laquelle se produit une baisse modérée du flux suivie de la dernière phase durant laquelle le flux baisse très lentement (figure 3 . 1 ). Cependant dans certains cas, la phase I qui dure moins d'une minute, peut ne pas être observée.
Au cours de la première phase se forme rapidement une couche limite de concentration donnant lieu au phénomène de polarisation de concentration, qui dure entre 3 et 4 secondes dans le cas de la microfiltration du sang [JAFFRIN & al. (1992)] et de 1à 2 minutes dans le cas de l’ultrafiltration du sang [DING & al. (1993)]. C’est un gradient de concentration qui s’établit à la surface de la membrane dû au transfert convectif des particules vers la surface de la membrane sous l’effet du gradient de pression; transfert convectif équilibré par un transfert diffusionnel qui est dirigé vers le centre de la veine liquide en régime établi. Le blocage sera d’autant plus total que les particules et les pores sont semblables en forme et en taille [BELFORT & al. (1993)]. |
Fig. 3.1 différentes phases d'évolution du flux. |
Durant la seconde phase on assiste à l’apparition d’un dépôt à la surface de la membrane. Le colmatage interne des pores est en partie dû à un phénomène d’adsorption des particules ou macromolécules à la surface des pores sous l’effet d’interactions hydrophobiques, de forces de VAN DER WAALS. La formation de dépôt à la surface de la membrane peut faire naître des phénomènes secondaires lorsque la concentration à la membrane atteint certaines valeurs. En osmose inverse par exemple on peut atteindre la limite de solubilité des sels et avoir une formation de tartres comme le CaSO4, le CaCO3 lors de la déminéralisation d’eaux salines. Dans le cas de l’ultrafiltration on peut aboutir à la formation d’un film (gel) plus ou moins épais, suite à la précipitation des macromolécules lorsqu’on atteint la concentration de gel.
Le phénomène de polarisation de concentration est un phénomène prépondérant en filtration plus particulièrement en ultrafiltration. Ce phénomène est réversible à l'inverse de celui du blocage des pores qui lui peut s'avérer irréversible selon la nature de la membrane, des espèces en présence et des interactions physico-chimiques dont ces espèces en présence peuvent être l'objet. La compréhension de la baisse du flux de filtrat passe donc par une compréhension des différents phénomènes mis en jeu. Plusieurs modèles ont été à ce titre proposés pour tenter de décrire cette variation du flux de perméat.